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27 juin 2014 5 27 /06 /juin /2014 11:59

M.C., un des lecteurs de ce blog, m'a posé une question intéressante. Il indique avoir lu plusieurs de mes livres, ce qui me réjouit, et me dit être surpris du ton aimable et relativement léger du blog, par comparaison avec ma littérature qui est souvent moins conviviale et plus agressive.

Il me demande si c'est une volonté de ma part d'avoir un langage accueillant dans ce blog qui constituerait une vitrine publicitaire, ou bien si d'aventure je ne souffrirait pas d'un trouble psychologique, en quelque sorte étant atteint de personnalité dissociée, voire de personnalités multiples.

Je vais certainement décevoir mon correspondant en lui disant qu'il a raison sur les deux points.

Ce blog est effectivement pour moi un moyen de communication, de m'adresser directement à mes lecteurs, de leur parler de ce que j'écris, parfois aussi de ce que je ressens. La publicité entre tout à fait dans l'objet de ces lignes. Je ne dois pas en avoir honte.

Si mes livres tiraient en dizaines, voire centaines de milliers d'exemplaires, je n'aurais pas à me préoccuper de ce blog. Une telle activité serait l'apanage d'une assistante de mon éditeur, et à la limite serait sous l'angle publicitaire, inutile. En effet la moindre ligne que je tracerais serait immédiatement répercutée à toute la francophonie par le Figaro Littéraire et tous les quotidiens, sans oublier Le Chasseur Français et Modes et Travaux.

Comme ce n'est pas le cas, blog.

Sur le second point, M.C. a vu juste : effectivement je suis atteint de dissociation de personnalité. Il n'a pas eu grand mérite à avoir saison, parce que NOUS AVONS TOUS DES PERSONALITES MULTIPLES !

C'est cette aptitude qui rend la vie en société possible. Chacun de vous ne s'adresse pas dans les mêmes termes et sur le même ton à son conjoint, son associé, son patron, ou son percepteur. Il n'emploie pas les mêmes mots lorsqu'il cajole son chien ou vient de se donner un coup de marteau sur le pouce. Lorsque sa voie est bouchée par un véhicule de police, il ne lance pas à son conducteur :"Avance ! Coco !" Moi-même lorsque je fais une causerie, une lecture, voire une conférence, et que j'ai à faire face à une contradiction stupide, agressive, parfois insultante, je n'utilise pas à l'égard de cet individu des mots provenant du langage ordurier des trois langues que je pratique. J'en ai pourtant une furieuse envie. J'arbore mon sourire le plus aimable et je commence toujours par "Cher Monsieur ou chère Madame"...

Précaution oratoire, hypocrisie sociale ou personnalité dissociée ? Les trois certainement. Un écrivain, même modeste, a l'obligation de l'être ou en tout cas de le paraître. En effet un nombre assez important de lecteurs considère que le réalisme d'un livre est nécessairement la conséquence directe de son caractère autobiographique. Ainsi pour eux j'ai nécessairement été un grand séducteur, un investigateur en matière criminelle, un agent secret, un espion, un tueur à gage... Je n'essaie même pas de les raisonner en leur rappelant que j'ai fait des études, occupé des emplois, exercé une profession libérale très prenante, eu des responsabilités associatives d'un haut niveau, mené une vie familiale, consacré pas mal de temps à me reposer ou à être malade... Ils ne veulent rien entendre.

Moins encore essaierais-je de dire qu'un auteur d'ouvrages d'imagination devient dans une certaine mesure ses personnages pendant la durée où, les mains sur le clavier, il les fait vivre. On croirait que je mens ou que je suis fou.

Il faudra que j'essaie un jour de laisser entendre à mon interlocuteur qu'il a raison, que j'ai bien été tout ça et plus encore, et pire encore. Je suis à peu près sûr qu'il me croira.

"Une idée simple et fausse, prédomine toujours sur une idée complexe mais juste"

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